28/07/23 - Démembrement : les modèles de convention Cardif
GILBERT ROUX Vous le savez probablement déjà, Cardif vient de sortir ses nouveaux modèles de convention de démembrement et pour en parler avec nous, j'ai le plaisir de recevoir une nouvelle fois Ariane Bouloumié juriste patrimonial chez BNP Paribas Cardif. Nous avons déjà évoqué le démembrement d'un contrat d'assurance vie ou de capitalisation dans nos podcasts, mais le sujet que vous allez traiter aujourd'hui concerne une étape primordiale à la mise en place de ce dispositif. Il s'agit des conventions de démembrement. Alors à quoi servent-elles exactement, ces conventions, Ariane ?
A quoi servent les conventions de démembrement ?
ARIANE BOULOMIÉ Les modèles de conventions démembrées que nous vous proposons permettent d'informer l'usufruitier et le nu-propriétaire des modalités de fonctionnement du contrat si rien n'a été prévu par ailleurs, chez le notaire notamment. Par exemple, l'usufruitier a-t-il le droit d'effectuer des arbitrages sans l'accord du nu-propriétaire ? Ou encore, comment cela se passe-t-il en cas de rachat au-delà des intérêts du contrat ? Quels sont les choix qui s'offrent aux titulaires dans ce cas ? : versement du rachat entre les mains du seul usufruitier qui disposera alors d'un quasi- usufruit, ou bien versement du rachat sur un compte démembré, ou encore ils peuvent prévoir qu'une répartition sera effectuée entre eux après paiement entre les mains de l'usufruitier. Tout cela est expliqué et détaillé dans les modèles de convention.
GILBERT ROUX Alors, vous dites, les modèles de convention. Ça veut dire qu'il n'y a pas un modèle universel, dirons-nous ? Il y a plusieurs modèles de convention ?
Existent-ils plusieurs modèles de convention ?
ARIANE BOULOMIÉ Oui, nous vous proposons huit modèles de convention démembrée. Certains modèles sont propres aux contrats d'assurance vie et d'autres aux contrats de capitalisation. Pourquoi en fait plusieurs modèles ? C'est pour couvrir un maximum de cas de figure. Par exemple, les co-titulaires d'un contrat de capitalisation peuvent donner la nue-propriété de ce contrat commun à leur enfant unique tout en se réservant l'usufruit. Dans ce cas, il y a plusieurs usufruitiers, les parents, qui restent les usufruitiers conjoints. Mais il peut aussi s'agir par exemple de la donation d'un bien propre avec réversion au profit du conjoint survivant créant ainsi un usufruit successif. Les conséquences de ces différentes situations doivent être prévues dans nos actes, et notamment ce qu'il se passe en cas de décès de chacun d'eux. En tous les cas, nous sommes à votre disposition si vous avez besoin d'aide pour savoir quel modèle de convention convient à votre cas de figure.
GILBERT ROUX Alors, quelles sont les conditions que doit remplir le souscripteur pour souscrire un contrat en démembrement ?
Souscription d’un contrat d’assurance vie ou de capitalisation en démembrement : quelles sont les conditions à remplir ?
ARIANE BOULOMIÉ Selon les objectifs du client, on peut ouvrir soit un contrat d'assurance vie, soit un contrat de capitalisation en démembrement. Attention à bien vérifier que tous les co-souscripteurs soient bien résidents fiscaux français, car sinon la souscription ne sera pas possible chez Cardif. Il faudra également veiller à ce qu'il y ait un contrat par nu-propriétaire, c'est très important. En fait, le démembrement de propriété doit préexister obligatoirement avant la souscription du contrat. Donc la souscription du contrat n'est que le remploi de sommes démembrées. Il y a trois façons de créer un démembrement : soit dans le cadre d'une succession, soit suite à une donation de la nue-propriété avec réserve d'usufruit ou par le biais d'une clause bénéficiaire démembrée avec remploi, d'un contrat d'assurance vie.
GILBERT ROUX Alors, je rappelais tout l'intérêt que représente la souscription en démembrement d'un contrat d'assurance vie ou de capitalisation, et ce que vous nous expliquez nous conforte dans cette idée. Et pour autant, on constate que peu d'assurés finalement utilisent cette possibilité en assurance vie.
Quel est l’intérêt de souscrire un contrat d’assurance vie en démembrement ?
ARIANE BOULOUMIÉ Effectivement, pourtant le contrat d'assurance vie démembré permet de transmettre les capitaux dans le cadre de la fiscalité privilégiée de l'assurance vie. Concrètement, comment ça se passe ? Nous avons alors deux cotitulaires du contrat, usufruitier et le nu-propriétaire. C'est le nu-propriétaire qui est alors à la fois co-souscripteur du contrat et l'assuré. De ce fait, concernant la fiscalité en cas de décès, peu importe l'âge de l'usufruitier, ce qui compte, c'est l'âge du nu-propriétaire qui va déterminer la fiscalité applicable. Ainsi, si le nu-propriétaire a moins de 70 ans lors du versement des primes, la fiscalité de l'article 990-I du CGI pourra s'appliquer. En pratique, au décès de l'usufruitier, qui devra intervenir, donc, avant celui du nu-propriétaire, ce dernier, le nu-propriétaire, devenant alors plein propriétaire du contrat, pourra transmettre au bénéficiaire de son choix les capitaux décès avec la fiscalité avantageuse de l'assurance vie. Par exemple, pour un concubin, au-delà de l'abattement de 152 000 €, les taux d'imposition sont de 31,25% maximum dans le cadre de l'assurance vie, alors que selon le barème progressif des successions, ce taux serait de 60%. Donc en fait, plus le montant transmis est élevé, plus la souscription démembrée d'un contrat d'assurance vie peut s'avérer intéressante.
GILBERT ROUX Un point important que vous avez évoqué, Ariane, c'est la possibilité pour un assuré de prévoir un démembrement avec remploi de sa clause bénéficiaire. Alors, je crois que ça mérite quelques explications complémentaires.
Comment prévoir un démembrement avec remploi de la clause bénéficiaire ?
ARIANE BOULOMIÉ Oui, tout à fait, l'assuré peut avoir décidé au moyen de sa clause bénéficiaire de faire naître un démembrement en désignant, par exemple, le plus souvent son conjoint usufruitier et ses enfants nus-propriétaires avec remploi dans un actif démembré comme un contrat d'assurance vie démembré, par exemple. Ceci permet alors de fournir des revenus au conjoint bénéficiaire qui peut percevoir les intérêts du placement, et à son décès les enfants récupèrent le bien en pleine propriété en franchise totale de droit. Donc le démembrement n'est d'ailleurs pas limité au conjoint et aux enfants, nous pouvons aussi le rencontrer par exemple entre les enfants et les petits-enfants du défunt. Les bénéficiaires peuvent alors décider de remployer les capitaux décès démembrés dans un contrat d'assurance vie ou de capitalisation, et de les faire fonctionner ensemble. Le conjoint sera alors co-souscripteur pour l'usufruit et chacun des enfants sera co-souscripteur pour la nue-propriété en gardant en tête qu'il faut un seul nu-propriétaire par contrat. Il est cependant en pratique plus fréquent que l'assuré prévoit une clause bénéficiaire en quasi-usufruit. Nous avons à ce sujet deux modèles de clause bénéficiaire à votre disposition, avec remploi ou en quasi-usufruit.
GILBERT ROUX Alors, Ariane, il y a souvent des interrogations sur la différence entre le démembrement classique, pourrait-on dire, et le quasi-usufruit. Là aussi, je crois qu'on a besoin de quelques éclaircissements.
Quelle est la différence entre le démembrement classique et le quasi-usufruit ?
ARIANE BOULOMIÉ Il convient en effet de distinguer le démembrement classique et le quasi-usufruit. Pour les sommes d'argent, en effet, on parle en principe de quasi-usufruit selon l'article 587 du Code civil. Dans ce cas, le quasi-usufruitier dispose des mêmes prérogatives qu'un plein-propriétaire et peut alors dépenser entièrement les sommes faisant l'objet du quasi-usufruit. De façon générale, les assurés choisissent le plus souvent un paiement au conjoint survivant sous forme de quasi-usufruit pour lui laisser plus de latitude pour disposer de ces sommes. Attention cependant, le quasi-usufruitier dans ce cas dispose d'une liberté totale sur le capital décès et cela pourrait conduire à une dilapidation des fonds et donc à une impossibilité pour les nus-propriétaires au décès de l'usufruitier de récupérer cette somme si l'actif successoral était insuffisant. L'usufruitier peut quand même éventuellement fournir lors de la perception des capitaux une garantie afin de préserver la créance de restitution du et des nus-propriétaires, mais cela est rarement demandé en pratique. Enfin, cette créance de restitution des nus-propriétaires devra impérativement être constatée par un acte sous seing privé enregistré ou dans un acte notarié, afin de la rendre opposable à l'administration fiscale et ainsi prévenir toute contestation de cette dernière.
GILBERT ROUX Alors, si je suis bien ce que vous venez de nous expliquer, Ariane, si un quasi-usufruitier souhaite souscrire un contrat d'assurance vie ou de capitalisation, le contrat, dans ce cas, ne sera pas démembré.
ARIANE BOULOMIÉ Tout à fait, le quasi-usufruitier sera le seul titulaire du contrat d'assurance vie ou de capitalisation comme s'il était plein-propriétaire.
GILBERT ROUX Il est clair que le démembrement doit être préalable à la souscription, c'est ce que vous nous avez déjà expliqué, mais si toutefois je possédais un contrat de capitalisation et que je souhaitais mettre en place un démembrement quelques temps après l'avoir souscrit, est-ce que dans ce cas précis, je peux le faire ou pas ?
Est-il possible de démembrer un contrat de capitalisation après sa souscription ?
ARIANE BOULOMIÉ Oui, il en effet possible aussi que le titulaire d'un contrat de capitalisation effectue la donation de la nue-propriété de son contrat. Donc le titulaire se réserve alors l'usufruit tout en donnant la nue-propriété. Le nu-propriétaire devient alors également titulaire du contrat. Nous recommandons alors que cette donation soit effectuée chez un notaire. Ce dernier pourra veiller à prévoir les modalités de fonctionnement du contrat suite à la donation. En pratique, il est préférable qu'un contrat de capitalisation soit détenu par un seul usufruitier et un seul nu-propriétaire. Donc si un parent souhaite donner la nue-propriété de ses contrats de capitalisation à ses enfants, il sera préférable qu'il y ait autant de contrats de capitalisation que d'enfants. Enfin, compte tenu du barème de l'article 669 du CGI, C ode général des impôts, plus on donne tôt, moins la valeur de la nue-propriété est élevée et moins l'assiette taxable sera importante, de ce fait. Mais attention, contrairement au contrat de capitalisation, un contrat d'assurance vie ne peut pas être démembré en cours de vie du contrat.
GILBERT ROUX Eh bien voilà, nous en savons plus sur le démembrement et sur les nouvelles conventions mises en place par Cardif. Un grand merci à vous, Ariane Bouloumié, d'être venue nous partager votre expertise sur ce sujet dans le podcast des #RDVExperts. Merci, Ariane.
ARIANE BOULOMIÉ Merci à vous. À bientôt.